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Une toute première question presque incontournable. De la robe au papier peint, de la surface de tissu qui devient à la fois volume et sujet (bien plus qu’un objet), à la surface qui reste plate et devient architecture : quelle est votre définition, continuité ou rupture ? Affinités ou mondes lointains ?
J'ai toujours vécu dans mon propre monde, fait d'un ordre désordonné et d'un désordre ordonné. Hors des lignes, et des marges. J’adorais salir, souiller, rendre impur, mettre en contact les surfaces et les objets les plus disparates.
Ma fantaisie a toujours été encombrée de façon chaotique. Derrière des tas de journaux, livres, feuilles, crayon pastels, et gribouillis. Dans ma chambre d'adolescent, j'avais une table pliante qui semblait s’écrouler à tout moment sous ce poids. Personne ne pouvait y toucher.
L'envie de transposer en signes ce qui m'entoure et est en moi est devenue de plus en plus pressante au fil du temps. Comme si quelque chose en moi voulait à tout prix sortir et s’exprimer. C'est pourquoi je me ballade toujours avec des cahiers, des blocs-notes, des agendas et des carnets de récits. Sans eux, je suis perdu et je ne me sens jamais seul avec eux. Les lignes, les dessins, les dégâts, les ciumpulls, ciuroddus, sont mes mots tacites, le code à travers lequel mon monde se matérialise. Travailler sur les murs est donc un rêve devenu réalité.
« Nulla dies sine linea ». Pas de jour sans prendre un crayon dans la main et sans tracer de trait...
Le dessin de My Africa, évoque un thème qui vous est très cher. Dans La Famiglia Pois, qui m'a tout de suite rappelé le « Pierrot Mon Ami » de Queneau, on retrouve votre poétique faites de collage, de juxtaposition, superposition, qu’on dirait même que vous avez transformé des pages de vos célèbres agendas des pensées en parois. Dans Kaleidos, il y a ce souffle d'émerveillement dignes de certains illuminated printings du XVIIIe siècle. Quelles autres facettes de votre créativité aimeriez-vous explorer avec Wall&decò ?
Je ne fais aucune distinction entre mode, art, cinéma, danse, littérature, théâtre. Entre cultures dites «haute» et populaire. Pour moi, elles ne font qu’une. J'ai la chance de faire un travail qui me permet tous les mélanges les plus inattendus. Je ne fais qu’aller au-delà des frontières de la mode, vers d'autres domaines. Je ne fais aucune distinction, l’une de mes caractéristiques est de mélanger, assembler, envahir et en découvrir ses effets.
Les points fondamentaux sont le mélange des langages, l'expérimentation, le brassage des techniques et de l'artisanat avec des processus inhabituels et contemporains.
Et encore et toujours des projets basés sur la déconstruction et la décontextualisation. Ce qui m'attire, c'est l'aspect irrégulier, impur, brut des objets, qui fait, à mon avis, l’unicité et la beauté.
Une esthétique de l'imperfection, une recherche et une expérimentation qui trouvent leur sens dans la dichotomie entre ancien et contemporain, entre unicité et sérialité.
Avec Wall&decò, je souhaiterais créer des projets ad hoc, ou sur mesure comme dirait un tailleur : on me présente une maison, une chambre, un mur et je vais travailler sur le particulier, sur l'expérience, et sur le cas personnel.
Une pièce recouverte d’un de vos papiers peints. A l'intérieur, un personnage de l'histoire ou de la fiction (de la littérature au cinéma). Qui est-il ?
De toute évidence, Alice au pays des merveilles ! Mon amie Lella Costa a écrit cette comptine pour son émission sur Alice, une occasion unique où j'ai fait la robe. Je me vois en elle comme dans un miroir et je voudrais une pièce où le papier peint soit fait pour elle.
photo credits: Daniela Zedda
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